Par Yvon Mantha, éditeur en chef
Je vous présente avec fierté l’évolution de la revue Voir Dire depuis ses tout débuts jusqu’à nos jours. C’est un jalon d’histoire quelque peu mouvementé.
Il faut dire qu’au début de l’aventure, nous n’avons jamais pensé qu’un jour nous fêterions nos presque 40 ans d’existence. Nous avons réussi à gérer ce projet de main de maître et avons atteint notre objectif de publier notre revue tous les deux mois, et ce, depuis 38 ans précisément. En cours de route, nous avons ramé contre vents et marées et avons, à maintes reprises, rencontré quelques embûches, pour finalement arriver à bon port après nous être acquittés de notre mission de façon admirable et déterminante.
Avec l’arrêt de la parution de l’Ami des Sourds en 1974, ainsi que des dernières parutions de l’Écho du Sourd et du Sourd Québécois, respectivement en 1979 et en 1980, la collectivité sourde francophone se retrouve sans aucune publication. C’est en 1983, suite à une demande de subvention de l’Association des Sourds du Montréal métropolitain (ASMM) auprès du gouvernement, que nous avons pu assister à la naissance de la revue Voir Dire, qui se veut non seulement un organe d’information, mais aussi un outil politique dont l’objectif est la défense des droits des Sourds.
Au départ, nous étions subventionnés et parrainés par l’ASMM (Association des Sourds du Montréal Métropolitain). Madame Lisette Lamontagne en était alors la présidente, tandis que monsieur Arthur LeBlanc était celui qui coordonnait le projet intitulé « Communication-Sourds », projet subventionné par le ministère fédéral de la Main d’œuvre et de l’Immigration. Grâce à la subvention accordée à ce projet, cinq employés ont pu être embauchés et toutes les dépenses de la revue furent payées pour les trois premières parutions. Un des personnages clés de cette époque fut sans contredit monsieur Robert Forgues, alors rédacteur en chef de la revue. Nous étions installés dans l’ancien bureau de l’ASMM qui était situé à ce moment-là dans le local du 3700 rue Berri, à Montréal. Vers la fin des années 1980, l’ASMM s’est fusionnée avec l’Association des adultes avec problèmes auditifs (AAPA) pour ensuite devenir, en 1991, le Centre de la Communauté Sourde du Montréal métropolitain (CCSMM).
Après avoir occupé le local de la rue Berri pendant près de cinq ans, Voir Dire emménage, au printemps 1988, en même temps que d’autres organismes, à la Maison de la Surdité située au 10 055 de la rue Papineau, à Montréal. Ce séjour dans cet édifice fut bref, car, le 1er juin 1990, la Fondation des Sourds du Québec, qui a financé le bail de location pendant près de trois ans, décide de fermer le local et c’est sur la rue Esplanade que Voir Dire reprend ses activités pour quelques années. Par la suite, en 1993, sous le giron du CCSMM, Voir Dire emménage avec d’autres organismes au 65 rue de Castelnau Ouest et y réside pendant près de sept ans. Vers la fin de l’année 2001, le déménagement du CCSMM à la Maison des Sourds sur la rue Crémazie Est met fin à toute collaboration avec Voir Dire, suite à une mésentente.
C’est au début de 2002 qu’une toute nouvelle collaboration se développe avec la Fondation des Sourds du Québec (FSQ). Grâce à cette collaboration, nous avons pu bénéficier de leur soutien financier et matériel en établissant le siège social de la revue dans leurs locaux situés au 725 boul. Henri-Bourassa Ouest, là où se trouve le magasin de surplus de bureau. Ce séjour sur Henri-Bourassa fut de courte durée, jusqu’à l’automne 2002, et ensuite nous avons emménagé dans le magasin de surplus de la FSQ situé sur la rue Fleury Est. Les contraintes financières de la FSQ nous obligent à mettre fin à notre collaboration en décembre 2003.
Ce n’est qu’au printemps 2004 que Voir Dire a pu déménager au Centre des Loisirs des Sourds de Montréal (CLSM), sis au sous-sol de l’église St-Vincent-Ferrier. Pendant près de sept ans, nous avons pu jouir de l’excellente collaboration du CLSM grâce à un échange de services tels que local, soutien administratif et technique. Ce fut pour nous un soutien inestimable pour assurer notre continuité.
Au printemps 2007, suite au retrait de monsieur Arthur LeBlanc, nous avons accueilli un nouvel éditeur, monsieur Philippe Jules Desrosiers. Sa nomination au poste d’éditeur en chef fut de courte durée, soit pendant près de deux ans, car il a dû démissionner pour des raisons personnelles.
En 2008, lors du 25e anniversaire de fondation, monsieur Élie Presseault fut notre premier employé, embauché grâce à une subvention de Sphère-Québec et Emploi-Québec, et ce, pour une durée de six mois. Une des priorités parmi les tâches que nous lui avons confiées fut de seconder le comité organisateur dans la planification du 25e anniversaire, un événement qui fut très réussi!
L’année 2009 a été marquée par l'arrivée de deux coéditorialistes, mesdames Mireille Caissy et Hélène Hébert. Leurs nombreux écrits ou chroniques sont fort appréciés et se retrouvent toujours dans nos pages. Actuellement, Mireille Caissy n’est plus présente, pour des raisons personnelles mais son implication a été grandement appréciée. Les recherches pour trouver un nouvel(le) éditeur(trice) ont été infructueuses et c’est moi-même qui ai pris la relève de Philippe-Jules « en attendant »… il faut croire que mon travail n’est pas si mal puisque moi aussi je suis toujours de la partie, jusqu’à maintenant!
Parmi les réalisations au cours de 2009, il faut souligner la collaboration entre la revue Sourdine de l'Association des devenus sourds et des malentendants du Québec (ADSMQ) et Voir Dire, la rencontre entre PVD et la Société culturelle québécoise des Sourds en vue de l'intégration future de notre revue au sein de cette dernière, de même que la liste des subventions reçue par l’OPHQ qui pourraient nous dépanner au point de vue ressources humaines au cours des prochaines années. Notons également que Voir Dire, reconnue mondialement, a voyagé par l’entremise d’Arthur LeBlanc, fondateur de notre revue, qui était notre délégué à la Table ronde de la presse en Europe et dans les pays francophones, laquelle s'est tenue du 24 au 26 avril 2009 à Le Mans en France.
En 2010, les membres présents à l’assemblée générale annuelle de la SCQS, tenue le 21 mars, ont adopté majoritairement le projet d’intégration des Publications Voir Dire au sein de la SCQS. C’est un moment historique tant pour nos lecteurs que pour la communauté sourde tout entière! Des comités ont été mis sur pied afin d’élaborer une nouvelle politique concernant le contenu des textes, les bandes dessinées et les commanditaires. De plus, monsieur Jean-François Isabelle a initié un nouveau cahier « junior » à l’intention des jeunes fréquentant des établissements scolaires comme Gadbois, Lucien-Pagé, Esther-Blondin, Jules-Léger, etc. Dommage, que Jean-François, n’offre plus ce service, tant apprécié auprès de nos lecteurs. Dans la vie, rien n’est coulé dans le béton et nous devons accepter les changements de parcours de chacun, selon leurs disponibilités.
Un autre fait saillant de 2010 fut certainement le lancement du livre Apprendre à vivre aux frontières des cultures sourdes et entendantes de madame Marguerite Blais et monsieur Jacques Rhéaume, publié aux Presses de l’Université Laval. Madame Blais a généreusement offert aux revues Voir Dire et La Sourdine de se partager les profits issus de la vente de l’ouvrage. Une aide financière inestimable!
Le nouveau site de Voir Dire a aussi vu le jour en 2011 et sachez que nous travaillons sans relâche pour en améliorer le contenu. De nombreuses rencontres fort productives avec nos partenaires, la Société culturelle québécoise des Sourds (SCQS), la Fondation des Sourds du Québec (FSQ) et le Centre de communication adaptée (CCA) ont marqué 2011. L’objectif commun de ces rencontres est de voir un jour se réaliser le projet d’adapter le contenu de Voir Dire en langue des signes québécoise (LSQ), soit sur YouTube ou via notre site Web.
Le travail des comités mis en branle en 2010 a été présenté en mars 2011, lors de l’Assemblée générale de la SCQS tenue à St-Jean-sur-Richelieu. Les membres présents ont adopté majoritairement la politique éditoriale des textes, bandes dessinées et commanditaires. De plus, le coût d’un abonnement annuel à la revue est passé de 25 à 30 $ - après plus de dix ans sans hausse - en raison de l’augmentation des coûts reliés à l’impression et à la distribution.
Depuis le 18 septembre 2011, Voir Dire est déménagé dans de nouveaux locaux, à la nouvelle Maison des Sourds, située au 2200 boul. Crémazie Est. Ce déménagement s’avérait nécessaire tant pour notre équipe que pour nos abonnés. Notre but était de maintenir un service de qualité à un prix abordable tout en améliorant la gestion de la revue. Finalement, une nouvelle personne s’est jointe à l’équipe cette année-là, il s’agit de madame Wicky Hoeun Tang, webmestre. Elle a dirigé notre site Web pendant quelques années.
En mars 2012, nous avons participé à l’AGA de la Société culturelle québécoise des Sourds (SCQS) à Québec. La priorité, tel que discuté par les participants, fut sans contredit la demande de subvention qui permettrait à la SCQS d’embaucher du personnel.
Au courant de l’année 2012, il a aussi été question d’adapter le contenu de certains articles en LSQ pour ensuite les insérer dans le site Web de Voir Dire ou de Francosourds. Le manque de temps et de bénévole a retardé encore une fois la réalisation de ce projet tant attendu.
Le projet de Voir Dire junior, mis sur pied il y a plus d’un an, a pris fin lors de la dernière édition de janvier-février 2012, en raison d’un manque de ressources humaines. Nous remercions Tiphaine et Jean-François Isabelle pour leur excellent travail! Heureusement, nous ne perdons pas Jean-Francois qui a effectué un retour à la revue à titre de bédéiste pour ses chroniques sourdiennes.
Le Colloque portant sur l’avenir de Voir Dire s’est tenu le dimanche 18 novembre 2012 à la Maison des Sourds devant de nombreux collaborateurs. La dernière rencontre remonte au 4 mars 2007. Le développement technologique et communicationnel et ses divers réseaux sociaux ont beaucoup évolué au cours des dernières années. Le but du colloque était de discuter ensemble de l’avenir de notre revue en prévision des prochaines années. Un rapport a été publié dans l’édition de janvier-février 2013.
L’année 2013 a marqué le 30e anniversaire d’existence de la revue. Lorsque nous avons fondé la revue en 1983, Arthur LeBlanc et moi-même, nous n’avons même pas songé nous rendre si loin. La persévérance et le travail assidu de notre équipe, depuis les débuts de notre publication, sont la clé de notre succès. Mes sincères remerciements à nos éditorialistes Mireille Caissy et Hélène Hébert ainsi qu’à Jean-François Isabelle, bédéiste, et à Wicky Hoeun Tang, webmestre de notre site Web. Nous voulons souligner également pour leur excellent travail de gestion, Guylaine Boucher et André Chevalier qui sont aussi responsables des abonnements, de la publicité et des envois postaux. Sans oublier Guy Fredette et le CLSM, un des plus vieux partenaires présent depuis les débuts de la revue. Il s’est impliqué avec nous en tant qu’administrateur durant plus de vingt ans.
Après le succès de la célébration du 30e anniversaire en 2013, l’année 2014-2015 avait débuté par une réflexion et une restructuration pour Voir Dire, suite à un petit creux au point de vue financier. Les administrateurs de Voir Dire, en collaboration avec la SCQS, ont adopté, au début de l’année, une nouvelle orientation visant à rendre la revue viable et fructueuse avec les moyens du bord.
Nous avons entrepris une campagne de financement auprès de quelques entreprises privées. De plus, nous avons décidé d’organiser une activité de financement, soit le Déjeuner-Causerie du 4 octobre 2015, en compagnie de Marie-Andrée Boivin pour la projection du film « Femmes sourdes, dites-moi ». Cette d’activité, qui a attiré un grand nombre de personnes sourdes, malentendantes et entendantes, s’est tenue à guichet fermé à la Maison des Sourds.
L’année 2016 fut marquée par la publication du 200e numéro de novembre-décembre. Tout un exploit pour nous puisque nous avons réussi à atteindre nos objectifs avec une équipe de bénévoles et un budget fort restreint. Nous avons jusqu’à présent réussi à bien gérer la production tous les deux mois depuis 38 ans grâce aux annonceurs, commanditaires et aux abonnés.
Depuis l’année 2017, notre objectif est de réaliser un virage numérique avec Voir Dire. Ceci signifie de numériser les anciens numéros pour les insérer au site, un travail de longue haleine qui nécessite beaucoup de sous! Des démarches sont entreprises auprès de donateurs potentiels et de webmestres experts, mais les résultats tardent à se produire.
Saluons également la venue parmi nous de madame Nancy Palumbo qui a aimablement accepté de faire l’interprétation de l’éditorial et de textes en LSQ. Il lui faut un peu de temps pour s’adapter à cette tâche, mais le résultat est très prometteur. Les abonnés apprécient ce service.
Quelle fierté lorsque quelques textes et photos de Voir Dire ont été repris et publiés par les magazines de la communauté sourde européenne et internationale !
La représentante de Voir Dire au ReQIS, soit madame Hélène Hébert, présidente de cet organisme pendant près de six ans, s’est très bien acquittée de son rôle et a permis au ReQIS de fructifier, développer son expertise et l’organisme se porte graduellement de mieux en mieux.
Je veux souligner la collaboration de la Société d’histoire du Plateau Mont-Royal ainsi que madame Julie Élaine Roy pour la publication des textes et photos sur l’histoire de l’ancien Couvent. Elle avait reçu un courriel de la part de monsieur Jacques Ouellet, responsable du Bulletin de la Société d’Histoire du Plateau-Mont-Royal demandant à des anciens élèves d’évoquer des souvenirs de leur présence dans cette institution. Ce reportage coïncidait avec la fermeture probable de cette magnifique bâtisse.
Le 6 octobre 2018, au local du CSLM, ce fut une journée mémorable pour ceux qui étaient présents à la célébration du 35e anniversaire de Voir Dire. Près de 80 personnes étaient présentes pour appuyer la cause qui nous tient à cœur.
En rapport avec le virage numérique, depuis le printemps 2019, nous étions heureux de compter monsieur Marc-André Bernier, comme membre de l’équipe de production, puisqu’il s’occupe de numériser les anciens numéros de Voir Dire.
Au mois de septembre 2019, la communauté sourde du Québec accueillait madame Françoise Chastel, éditrice de l’Écho-Magazine de France. Une partie de l’équipe de Voir Dire a eu le bonheur de la rencontrer, lors de son passage à la Maison des Sourds. Une rencontre très fructueuse à tous les points de vue, au niveau de l’échange des informations entre les deux publications.
À l’automne 2020, Claude Drouin, infographe de notre publication depuis 22 ans nous faisait part qu’il quitte la revue pour consacrer à d’autres projets. C’est l’entreprise d’infographie Créativa Design qui lui succède après avoir rencontré trois candidats lors des entrevues. Une période de rôdage et de transition s’avère nécessaire pour que la nouvelle entreprise se familiarise avec les nouvelles de la communauté sourde.
Bravo à toute l’équipe, c’est grâce à vous que la revue Voir Dire a pu maintenir son indépendance!
Le contenu de la revue ne serait pas aussi vivant et aussi représentant de la réalité de notre communauté sans une collaboration de tous les instants avec nos partenaires : associations, organismes, établissements, etc. Merci à vous de nous permettre d’exister depuis si longtemps!